3 Cordées ... 1 sommet ...

Je n'ai pas pour habitude de vous compter de longue histoire …


Mais aujourd'hui, l'envie et l'inspiration me viennent pour vous raconter une belle aventure humaine. L'histoire de 3 cordées qui ne se connaissaient pas et se retrouvent au même endroit au même moment, ensemble, pour vivre une expérience mémorable et créer un lien que seule la montagne sait faire  ...

 

Voici l'histoire de ces cordées :

 

Jean-Charles, accompagné de son guide Daniel ; Thierry, Thibault et Jur, accompagnés de leur guide Ianis ; puis Cléone et Hugo avec qui j'ai le plaisir de m'encorder.

 

Avec Cléone et Hugo, nous avions prévu d'aller grimper à la Pointe Percée par l'arête du Doigt afin de bivouaquer à la belle étoile au sommet.
Avec Thierry, Thibault et Jur, après 2 jours de préparation technique, nous devions tenter l'ascension du Mont-Blanc par la voie normale du Goûter. 
Et avec Jean-Charles, nous avions prévu de venir au Grand Paradis mais quelques jours plus tard.

 

Cependant, les conditions de la montagne ainsi que la météo ne nous permettent pas de réaliser les plans initiaux. Alors on s'adapte, on étudie les bulletins météo, on appelle les refuges, on cherche les informations.

 

Et bien que rempli d'incertitudes, nous décidons d'être audacieux, de partir à l'aventure, tout en réadaptant notre course par rapport à toutes les informations que nous avons pu obtenir.

Nous tenterons donc notre chance au GRAND PARADIS, un sommet à 4061M d'altitude.

 

Nous nous retrouvons alors tous ensemble à "Pont" en Italie, au départ pour le refuge Vittorio Emmanuel. La météo est plus clémente que prévu. Nous ne sommes que très peu de cordées au refuge, l'incertitude des conditions et de la météo en ont dissuadé beaucoup. Nous ne savons pas ce qui nous attend, mise à part le vent et le froid. Mais nous avons tous envie de vivre une aventure. Sommet ou pas, cela nous importe peu. C'est ce doute qui nous motive.

 

Pour une grande partie des participants aujourd'hui, c'est la tentative de leur premier 4000, voir même leurs premiers pas d'alpiniste.

Après un bon dîner italien, une courte nuit, et un furtif petit déjeuner, nous sortons du refuge à 5h du matin et nous mettons en route.

Il fait nuit noire, un mélange de pluie et de neige mêlée tombe encore, créant une ambiance mystique dans la lueur des frontales. Le rocher est est de plus en plus glissant car recouvert d'une fine couche de givre ou de neige. Nous sommes attentifs …

 

Au bout d'un peu plus d'une heure de marche, nous sommes au pied d'une pente de neige assez raide. A partir de là nous évoluerons crampons au pieds. Le jour se lève, les précipitations cessent, le vent est faible, le moral des troupes est bon !

 

La montée en crampons serpente au milieu des rochers avec des pentes plus ou moins raides. Le rythme est régulier. Nous arrivons enfin sur le glacier, les choses se gâtent. Nous voilà exposés au vent, la fatigue et l'altitude commencent à se faire sentir. Nous décidons de nous équiper plus chaudement. Doudoune, Gore Tex, gros gants, bonnet, cagoule, et même masque de ski. Nous sommes maintenant tel le bonhomme “Michelin” et encordés pour évoluer sur un glacier recouvert par une bonne couche de neige fraiche.

 

Il y a encore des passages raides, mais tout le monde s'accroche et fait preuve de détermination pour aller embrasser la Madone.

 

Sur les derniers mètres avant les rochers de l'arête finale, Thibaut se sent mal et ne peut plus continuer. Il doit redescendre pour retrouver ses esprits. Nous modifions alors les cordées pour maximiser les chances de chacun d'aller au sommet, et redescendre Thibaut en sécurité.

 

Il fait très froid mais l'ambiance et la beauté des lieux nous envoutent et nous donnent l'énergie de continuer. Nous laissons alors les bâtons au pied de l'arête et commençons à grimper dans les rochers totalement couverts de neige. Nous terminons par une sorte d'échelle fixée dans la roche pour enfin arriver à 4061M d'altitude. La vue est si époustouflante. Nous sommes tellement heureux d'être ici. Avec une pensée tout de même a Thibaut, notre compagnon de cordée obligé de s'arrêter à quelques mètres du sommet.

 

Nous savourons notre réussite, photos, vidéos et selfies avec la madone au programme. 

 

Il faut alors redescendre par un itinéraire plutôt aérien et toujours recouvert d'une généreuse couche de neige, le rendant délicat. Et alors que nous sommes dans la descente, que voyons nous ? Thibaut et son guide Ianis, à nouveau dans l'ascension et en route vers la madone. Je ne sais où et comment Thibaut a pu retrouver la force et la motivation nécessaireS pour finalement monter jusqu'au sommet. Quelle belle preuve de détermination !

 

Au final, nous sommes 9 personnes, réparties en 3 cordées. Aucun de nous n'avait prévu d'être là aujourd'hui, mais nous nous encourageons tous et nous unissons afin de gravir ce sommet à 4061M d'altitude. Pour certains c'est leur premier sommet à plus de 4000M, voir même leur première d'alpiniste. Et c'est une réussite !

 

Cette aventure fût une excellente preuve de l'adaptation dont nous devons faire preuve en montagne. Nous ne choisissons pas un sommet, c'est la montagne qui choisit de l'aventure que nous allons vivre. A nous d'être à son écoute, et alors, elle s'offre à nous et nous promet des moments magiques, uniques.

 

Merci à tous pour ce bel esprit, et votre confiance …

 

Nous revivrons sans nulle doute d'autres belles aventures ensemble en montagne !